• Il y a quelques jours j'opérais une tentative de rangement de la bibliothèque qui me sert de lieu de vie. Histoire de classer des piles de photocopies d'anciens fanzines libertaires. Un passe-temps comme un autre. Au milieu des revues anars s'étaient glissés des carnets. Du genre de ceux où je note tout et n'importe quoi. De l'écriture bistrotière principalement. Je ne parlerais pas de jounal intime, j'ai encore en mémoire une phrase de Victor  : "J'ai toujours eu un dédain des journaux intimes rédigés dans le désir ou la savoureuse crainte d'être lus, par surprise ou plus tard. On n'y prend que la pose. Le contraire serait connu". Pas un journal, Victor, mais des carnets de bistrot, conservés comme des minutes de procés. Pour mémoire.

    Le carnet en question datait d'avant l'ouverture du passage. Les pages que j'avais sous les yeux  avaient été écrites un 25 décembre. J'avais quand même réussi à trouver un café ouvert. Je devais attendre Corsaire, comme toujours. Je caressais l'idée de lui écrire un texte : "Une histoire fantastique. Ecrire des phantasmes-des rêves-des scènes érotiques. Oui c'est ça. Des mises en scènes érotiques dans des lieux parisiens. Des rêves éveillés dans des immeubles en flammes. Où je serais Irma Vep. Ce serait comme les aventures d'Irma Vep dans le Paris de JFV. Irma ferait l'amour avec Victor, rencontrerait des chats, croiserait un Golem (...)". Le 26 j'écrivais encore : "j'avais imaginé que le premier épisode pouvait avoir lieu chez Robert Capia, au-dessus de sa boutique de poupées".

    Et c'est là que je voulais en venir.

    Il y a deux jours, en rangeant, je m'amusais de cette saynète pour rien, inventée un jour de noël, dont le décor aurait dû être l'appart de Robert, galerie Véro-Dodat. J'avais alors repensé à la boutique vide que nous avions évoquée dans un post il y a déjà quelque temps. La nuit dernière, quelqu'un - un ami ? - a laissé un commentaire en forme d'avis de décès : "Et ce lundi 1er octobre 2012 Robert nous a quitté...... Cérémonie au crématorium du Père Lachaise lundi 8 à 11h30.......   ;-( "

    La fermeture de la boutique m'avait enseigné que les poupées meurent aussi. La mort de Capia ne m'apprend rien. Si ce n'est que certaines disparitions marquent la fin d'une époque. Et comme il y avait quelque chose de l'esprit du Palais-Royal dans cet homme, sa mort est celle de l'esprit d'un lieu.

    Palais-Royal, game over

    (photo Sophie Bassouls, octobre 1986)

     


    1 commentaire



    Suivre le flux RSS des articles
    Suivre le flux RSS des commentaires