• Michèle Lesbre au Comptoir des mots jeudi 5 mai 2011

    Au printemps 1988, pour le 20ème anniversaire de mai 68, les éditions La Brèche publient un recueil de "22 nouvelles sur Mai". La maison d'édition est celle de la librairie du même nom (à l'époque 9 rue de Tunis, près de la place de la Nation), de la LCR (alors au 10 impasse Guéménée, près de Bastille) et de son journal Rouge (déjà à Montreuil ?). Le recueil s'intitule Black exit to 68.

    A cette date, JF Vilar n'est plus journaliste à Rouge, ni adhérent à la Ligue. Il y conserve des camarades, dont quelques amis. Il est devenu romancier et se retrouve mêlé à la préparation du recueil. Il écrit une nouvelle, Karl R. est de retour, qui est un peu sa biographie de Radek (pas le chat noiraud recueilli au début de C'est toujours les autres..., non ! le vieux bolchevik du 2ème procès de Moscou). Une biographie dans laquelle le révolutionnaire disparu (disparu n'étant pas nécessairement synonyme de mort ?) dans un camp en Sibérie, débarque dans les rues parisiennes en mai 1968. Il y rencontre une jeune étudiante trotskiste dont le pseudo Lara lui rappelle son grand amour Larissa Reisner. Lara le met en contact avec un dirigeant de son orga prénommé Alain (sic). Vêtu d'une longue veste de cuir râpée très kominternienne, il se promène avec enthousiasme des barricades rue Gay-Lussac à un meeting à la Mutu, louvoyant entre les jets de pavés et les grenades des CRS.

    Jonquet, Simsolo, Daeninckx, Périgot, Pouy, Fajardie, Naudy, etc., sont du projet. JFV propose à une amie d'en être aussi. Grâce à lui, il y a une écrivaine parmi tous ces écrivains mâles. Et grâce à lui, Michèle Lesbre commence, sinon à écrire, en tout cas à publier. Une courte nouvelle intitulée La rue, 3 ans avant la parution de son premier roman, La belle inutile.

    Michèle Lesbre milite un temps à la Ligue, à partir de 72. Mais elle ne monte à Paris qu'en 75. Il est donc peu probable qu'elle ait le temps de croiser Victor Blainville, qui quitte "l'orga" à ce moment-là (dans Nous cheminons..., le flic Laurent sort ses fiches : "En 1975, Vacek a été condamné à six ans de détention (...) on retrouve votre signature, au milieu de pas mal d'autres, au bas d'une pétition exigeant la libération de Jiri Vacek et de ses camarades (...) vous, de votre côté, à cette époque, officiellement, vous délaissez l'engagement politique radical. Vous vous installez en tant que photographe"). Par contre elle cotoie sans doute JF Vilar qui est journaliste permanent à Rouge. Elle quitte la LCR en 78, JFV la quitte en 81. Ils restent suffisamment proches pour qu'en 88 JFV la pousse au crime (enfin, à l'écriture).

    L'histoire éditoriale commune continue. Sabine Wespieser crée en 1997 la collection Babel Noir chez Actes Sud. Le premier volume publié est la réédition de C'est toujours les autres qui meurent. Pas étonnant alors que la devise de la collection soit une citation de JFV : "Le roman noir, parce que c'est la crise, se joue dans un état d'urgence. Il parle du monde, maintenant. Et le monde va vite. Tant pis si nous sommes fatigués".

    Parmi les livres publiés par Babel Noir dans les 2 mois suivants figure le 3ème roman de Michèle Lesbre, Une simple chute. Lorsque Sabine Wespieser quitte Actes Sud pour fonder sa maison d'édition sous son nom, elle emmène avec elle Michèle Lesbre dont elle publie désormais tous les romans. 

    Nous avons récemment évoqué son dernier ouvrage, Un lac immense et blanc. La narratrice voyage en souvenirs entre Paris, Ferrare et Prague, portant en elle la mémoire d'un ami disparu : "Dans quelles coulisses Antoine s'était-il faufilé ? Je pensais de plus en plus à lui comme à un personnage, sa disparition et ses apparitions créaient une sorte de fiction dans laquelle il devenait immortel, je m'attendais à le voir surgir chaque fois que sa présence aurait dû être évidente. Ainsi, devant les images de la chute du mur de Berlin, je le cherchais dans la foule et, si je l'avais aperçu, je ne m'en serais pas étonnée. Lorsque je suis retournée à Prague bien des années plus tard, il était encore avec moi dans la bibliothèque des livres interdits où j'ai feuilleté les tapuscrits de Hrabal signés de sa main, et ceux de tous les auteurs fichés par la police (...)". Prague où un jour Michèle Lesbre est partie sur les traces d'un nommé Victor B, accompagnée par Pierre-André Sauvageot. Nous parlerons de cela un jour.

    Nous avons aussi déjà parlé de la librairie "Le comptoir des mots". Justement, Michèle Lesbre y sera jeudi prochain (5 mai 2011), à 20h, pour lire quelques extraits de son livre. Hasards ?

      


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